Le Chrétien face aux rites et superstitions : Quelle attitude adopter?



Cyril Divine Ahorsu, SMA (Diacre)
Le mal nous fait confronter l’absurdité de la vie. Parfois on espère un bonheur mais c’est la malchance qui nous arrive. Ce contact du mal fait surgir toujours deux questions : d’où vient-il ? Pourquoi existe-il ? La recherche des causes de malchance qui nous arrive et les approches de solutions sont les préoccupations des individus, des familles, et des communautés. Souvent nous demeurons dans la superstition puisque les situations dans lesquelles nous nous trouvons dépassent notre compréhension et on cherche à faire des rites pour que nous soyons épargnés des châtiments. Quelle attitude le chrétien qui se trouvant dans une situation pareille doit-il adopter ? C’est la question que nous traiterons dans cet article.


Superstition
La superstition, c’est l’attachement étroit et formaliste à certains aspects du sacré. C’est aussi l’attachement excessif et irrationnel à quelque chose. La superstition fait croire que certains actes, certains objets annoncent ou attirent la chance ou la malchance[1]. C’est la croyance au pouvoir surnaturel de forces occultes à divers présages tirés d’événements fortuits. C’est une vaine croyance, vain présage ; une croyance à l’efficacité magique de certaines pratiques, à la signification surnaturelle de certains signes. Les peuples du monde entier ont leurs superstitions et leurs craintes.

Un contexte Africain
Dans le milieu Éʋé, En Afrique de l’Ouest, il y a plusieurs phénomènes qui signifient la présence du mal[2]. Il y a le meurtre, les maladies et l’accident incompréhensible. L’origine du mal est associée à des êtres spirituels autres que Dieu. C’est-à-dire, le non-respect pour certaines normes de la société. Il existe des normes que chaque individu doit respecter ; on doit participer aux rites et à l’observation des interdits. Cela marque le champ du sacré. C’est ainsi que la perfection morale et religieuse est identifiée à l’observance des interdits dictés par un esprit. Celui qui se détourne des normes de la société des vivants, est dit d’avoir fait des fautes et cela est considéré comme une rupture entre la divinité et les hommes. Dans ce sens, les ancêtres réagissent par un châtiment[3].
D’autre aussi attribuent l’origine de malchance à la sorcellerie. La sorcellerie signifie l’emploie de puissance mystiques contre le progrès de la société. C’est de cette façon que la croyance populaire fait de la sorcellerie, la cause de toutes sortes de malheurs, de maladies, d’accidents, de tragédies, de chagrins, de dangers et d’évènements triste qui se passent dans la vie quotidienne[4].

Quels sont les remèdes possibles pour qu’on soit épargnés des châtiments ?
Dans le cas d’une cause spirituelle, il faut que l’esprit malfaiteur soit réduit à l’état de faiblesse, ou corrompu en acceptant une offrande. Aussi, le respect du tabou approprié pourra annuler les effets de la faute ou force l’esprit à abandonner la répression. Le sacrifice d’un animal servira de substitut à la victime humaine en proie à la colère des esprits[5]. A ce point, il nous convient de reprendre notre question ; quelle attitude le chrétien doit adopter dans un contexte pareil ?

Le Chrétien
Le chrétien est le disciple du Christ, il est celui qui est dans le Seigneur Jésus-Christ (cf Ac 11, 26 ; Rm 16, 11). Soit un esclave qui a été appelé dans le Seigneur et il est un affranchi du Seigneur, soit celui qui était libre mais devenu esclave du Christ mais non pour devenir un esclave des hommes ou bien un esclave de quelque chose que ce soit (cf 1 Co, 7, 22). Il est configuré au Christ par le baptême et il est devenu une nouvelle créature (cf 2Co 5, 17). Un Chrétien est rempli d’Esprit Saint et de foi (cf), il est un fidèle en Jésus-Christ (cf Ac 11, 24 ; Ep 1, 1). Si le chrétien est le disciple du Christ, et qu’il est rempli d’Esprit Saint et de foi, alors face aux rites et superstitions, on proposerait que le chrétien adopte une attitude de la foi.

Une attitude de foi
La foi est quelque chose qu’on ne voit pas mais qu’on accepte comme réalité. D’un point de vue biblique : « La foi est une manière de posséder déjà ce que l’on espère, un moyen de connaître des réalités que l’on ne voit pas » (Hb 11, 1). C’est le don de Dieu à l’homme, pour que celui-ci puisse le connaître et le reconnaître en tout temps. En Jésus-Christ, Dieu invite l’homme pour qu’il communie avec lui afin qu’il connaisse Lui le seul et le véritable Dieu (Jn 17, 3). Mais l’homme ne peut pas agir en fonction de cet appel s’il ne l’entend pas (si Dieu ne se manifeste pas à lui). Alors, Dieu se manifeste par sa parole.

La parole de Dieu, source de la foi
La foi nous parvient par la parole de Dieu (Rom 10, 14-17). La parole de Dieu est la source de la révélation de Dieu en Jésus-Christ pour la foi (Concile Vatican II, Dei Verbum, Fides, 1967, n°10). Par ailleurs, le Christ lui-même est la parole de Dieu (cf. Jn 1,1) et le sommet de la révélation de Dieu (cf. He 1, 1-2). La parole nous interpelle chaque jour et ce qui compte pour le chrétien c’est d’observer ce que la Parole dit et d’observer les commandements de Dieu (1Co 7, 19). Seuls les commandements de Dieu comptent car ils sont salutaires et ils nous guident sur le chemin de la vérité. Ils nous donnent la paix comme un fleuve et la justice comme les flots de la mer (Is 48, 17-19). Ainsi, Jésus dira : « Tout homme qui écoute ce que je vous dis là et le met en pratique est comparable à un homme prévoyant qui a bâti sa maison sur le roc » (Mt 7, 24). Alors, la première des choses c’est de chercher à faire la volonté de Dieu.

L’Esprit de Dieu, la force de la foi
L’Esprit de Dieu donne la force, il montre la voie qui mène à Dieu et il défend face aux difficultés (Mt 4, 1). L’Esprit de Dieu n’est pas un Esprit de peur ou un esprit de timidité. C’est un esprit de force, d’amour et de maîtrise de soi (2Tm 1, 7). Il nous enseigne et il nous fait exprimer notre foi au moment difficile (Mt 10, 20). C’est un Esprit de courage et qui fait vivre (Jn 6, 63). Donc le Chrétien doit prier toujours pour demeurer dans l’Esprit de Dieu afin qu’il puisse exprimer sa foi en tout temps et en tout lieu ; même face aux rites et superstitions.

Deux mondes différents
Le monde superstitieux et le monde en Christ sont compris comme deux mondes différents, puisque par notre définition ci-haut, nous avons dit que la superstition fait croire que certains actes, certains objets annoncent ou attirent la malchance de l’homme. Au contraire, le monde en Christ donne la vie, une vie en plénitude (Jn 10, 10). Si le chrétien a fait son choix de suivre le Christ, il ne doit rien viser que le monde en Christ ; le Christ qui est la source de toute création et de toute vie (Jn 1, 3-4). Le chrétien ne doit pas être timide face aux rites et superstitions, car sa lumière et son salut c’est le Seigneur, la forteresse de sa vie, c’est le Seigneur (Ps 27, 1). Il doit avoir la confiance au Seigneur puisque le Seigneur protège et cache ses enfants au secret de sa tente (Ps 27, 5). Mais le chrétien qui vise autre chose que le Christ n’est pas digne du Royaume de Dieu : « Quiconque met la main à la charrue, puis regarde en arrière, n’est pas fait pour le Royaume de Dieu » (Lc 9, 62) puisque le monde ancien est passé, et qu’une réalité nouvelle est là (2Co 5, 17). Il faut qu’on comprenne que « personne ne coud une pièce d’étoffe neuve à un vieux vêtement ; sinon le morceau neuf qu’on ajoute tire sur le vieux vêtement, et la déchirure est pire ». De même « Personne ne met du vin nouveau dans de vieilles outres ; mais à vin nouveau, outres neuves » (Mc 2, 22). Alors, le chrétien qui a confiance en Christ ne doit pas conformer sa vie aux rites et superstitions.

Conclusion

La vie que Jésus-Christ, le Fils de Dieu nous donne est une nouvelle vie. Cette vie nous libère de toute sorte de peur, de timidité et de découragement. Il suffit d’avoir la foi qui nous parvient par la Parole de Dieu ; telle que nous la lisons d’une manière individuelle et telle que nous l’écoutons lorsqu’elle est lue et expliquée au cours des célébrations liturgiques. Cette question de chrétien face aux rites et superstitions relève d’une question de la foi. Mais si après avoir été configuré au Christ par le baptême, on conforme notre vie dans les cadres de rites et de superstitions, une question qui nous sera posée c’est : « pourquoi avez-vous si peur, n’avez-vous pas encore de foi ? » (Mc 4, 41).



Cyril Divine Ahorsu, SMA (Diacre)

Paroisse Saint Michel d'Adjamé


[1] Hachette, le Dictionnaire essentiel, Dictionnaire Encyclopédique Illustrée, Paris, 1993, p. 1754.
[2] Cf. Claude RIVIERE, Anthropologie religieuse des Éʋé du Togo, Lomé, Nouvelle Edition Africaine, 1981, p. 86.
[3] Cf. Idem, p. 106.
[4] “For African peoples sorcery stands for anti-social employment of mystical powers… African peoples feel and believe that all the various ills, misfortunes, sicknesses, accidents, tragedies, sorrows, dangers and unhappy mysteries which they encounter or experiences, are caused by the use of this mystical power in the hands of a sorcerer, witch or wizard”. Cf. John MBITI, African religions and philosophy, New York, Anchor Books, 1970, p. 261.
[5] Cf. Claude RIVIERE, Op. cit., p. 84.

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